Ce qu’il vous manque pour devenir un expert

By | 25 juillet 2013

Ceci est ma contribution à l’Evénement inter-blogueurs A la Croisée des Blogs du mois de juillet, organisé par Jérôme du blog Changer de vie par l’action sur le thème "Le jour où j’ai atteint ma limite".

Comment devenir un expert de renommée mondiale

Avez-vous l’impression de stagner dans un domaine où vous voudriez exceller ?

Peut-être que vous aimeriez devenir imbattable aux échecs, affiner votre écriture au point que l’on s’arrache vos livres, ou obtenir une renommée mondiale dans votre métier actuel !

Je ne doute pas que vous ayez atteint un niveau acceptable, ou en tout cas suffisant pour apprécier ce que vous faites, et vous lever chaque matin avec l’envie de développer encore davantage vos talents.

Seulement voilà, si vous avez commencé à lire cet article, c’est que vous avez sans doute l’impression de ne plus vraiment progresser. Se pourrait-il alors que vous ayez atteint votre limite d’apprentissage ?

Dans cet article, je vais partir d’un exemple personnel pour tenter de découvrir pourquoi certains arrivent au sommet de leur art, tandis que d’autres stagnent. Et nous verrons quelles options s’offrent à vous pour continuer à progresser jusqu’à obtenir le statut tant convoité d’expert dans votre domaine.

Pourquoi je n’ai pas participé à la 100ième du Tour de France ?

Ne riez pas trop vite. Il se trouve que je ne me débrouille pas trop mal en cyclisme. Lorsque j’étais adolescent, à environ 16 ans, mon père a créé un club de cyclisme dans le petit village où nous habitions, dans le Béarn.

Durant ces quelques années d’initiation, je disputais des courses avec des coureurs réputés. Le plus connu était Hervé Duclos-Lassalle, fils du grand champion Gilbert Duclos-Lassalle, célèbre notamment pour avoir gagné deux fois le Paris-Roubaix, en 1992 et 1993. Pour vous donner une idée, Hervé est même devenu coureur professionnel par la suite, allant jusqu’à décrocher une participation au Tour de France, malheureusement soldée par un abandon sur chute.

Ce fut une expérience très enrichissante, où j’ai vraiment commencé à apprécier les vertus du sport. Je vous avouerais que je n’ai jamais vraiment percé dans les courses auxquelles j’ai participé. Mais j’ai hérité de muscles bien développés au niveau des cuisses. Je n’ai plus peur de monter des cols ardus, tels que le Tourmalet. J’ai même réalisé le défi de relier Grenoble à Saint-Tropez d’une traite en traversant les Alpes !

En d’autres termes, je ne me débrouille pas trop mal. Mais je ne me débrouille pas trop bien non plus. Je suis resté au stade, disons, d’amateur éclairé.

Une histoire de potentiel ?

Se pourrait-il alors que je ne sois pas fait pour le cyclisme ? Après tout, Hervé est bien le fils d’un grand champion. Quelle chance aurais-je eu contre les lois de la génétique ?

A vrai dire, mes gènes n’ont rien à lui envier. Je suis de carrure plutôt svelte, ce qui est bon signe pour un sport d’endurance comme le cyclisme. Et mon père est lui-même un mordu de cyclisme. Il a même eu quelques succès dans les courses auxquelles il a participé en tant qu’amateur, ayant notamment participé au Tour de France Montagnard, dont il garde précieusement la médaille.

Donc manifestement, aucune limite physique n’aurait pu m’empêcher de monter en compétence et de devenir un champion, si les circonstances avaient été favorables. Que s’est-il donc passé ?

La loi des 10 000 heures

La réponse, il faut la trouver dans le manque de pratique. Premièrement, Je suis venu tardivement sur ce sport. Dans les courses que je disputais, de nombreux jeunes étaient déjà dans le bain depuis longtemps.

Hervé lui-même a commencé à gagner ses premières courses en minime, à l’âge de 14 ans. Là où de nombreux jeunes avaient pu gagner en assurance, je commençais à faire mes armes.

Non seulement je suis venu tardivement sur ce sport. Mais n’ayant jamais pratiqué un sport de manière assidue, je redoutais la douleur qu’allait me causer chaque nouvelle sortie. J’avais du mal à voir la finalité de cette souffrance, à part pour faire plaisir à mon père. J’y allais donc en trainant des pieds. Et dans ces conditions, bien sûr, je ne m’entrainais pas suffisamment.

Or dans le livre Outliers, Malcolm Gladwell raconte que pour devenir un expert de renommée mondiale, il n’y a pas de miracle : il faut accumuler les heures de pratique. Les chercheurs sont même arrivés à un nombre magique : 10 000 heures, soit grosso modo 10 ans de pratique à raison de 3h d’entraînement par jour.

C’est le nombre d’heures que les plus grands prodiges ont passé sur leur art, avant de devenir des experts incontestés. Les Beatles, par exemple, sont connus pour avoir cumulé une expérience considérable en jouant en continu dans des bars de strip-tease à Hambourg. Ils jouaient habituellement 6 à 9 heures d’affilée en live, 5 à 7 jours par semaine !

Bill Gates est un autre passionné notoire, ayant passé des nuits blanches à tire-larigot sur ses lignes de code lorsqu’il était encore adolescent. A l’époque, les ordinateurs occupaient encore toute une pièce, et seuls quelques privilégiés y avaient accès. Mais Bill Gates et son ami Steve Balmer arrivaient toujours à se débrouiller pour obtenir des heures d’accès gratuites.

La pratique ne suffit pas

La pratique est certes nécessaire. Mais elle ne suffit pas. Tout d’abord, insistons sur l’importance de la nature de l’entraînement. Pour optimiser sa progression, il est très important de constamment repousser ses limites. En d’autres termes, il faut se faire mal : une notion difficile à inculquer à un sportif débutant, qui préfèrera plutôt privilégier son propre plaisir. D’ailleurs, ne dit-on pas "amateur" par opposition à "professionnel" ?

Optimiser son entraînement suppose aussi un encadrement adapté. Dans mon cas, j’ai certes bénéficié de l’expertise de mon père en tant qu’entraîneur. Mais Hervé Duclos-Lassalle était fatalement exposé à davantage de conseils d’entraîneurs professionnels, ayant pu l’aiguiller et faciliter sa progression.

Nos deux mondes étaient probablement très différents. Hervé Duclos-Lassalle a baigné dans la culture du cyclisme dès son plus jeune âge. Il a assisté aux nombreuses courses de son père, dont la fameuse victoire de 1994 à Paris-Roubaix pour la deuxième fois consécutive. Cette expérience a été forte en émotions, comme le souligne une interview de Hervé dans cet article : La gloire de mon père. Imaginez donc combien cette expérience a pu inspirer le jeune Hervé à l’époque !

Enfin, dernière petite remarque : il se trouve que la famille Duclos-Lassalle habite à Lembeye, une ville perchée au sommet d’une longue côte. N’est-ce pas un terrain d’entraînement idéal pour un jeune cycliste ?

Le plan d’action

D’après le parallèle que j’ai réalisé entre mon expérience du cyclisme, et celle d’un futur champion comme Hervé Duclos-Lassalle, on peut tirer plusieurs leçons.

Si vous désirez devenir un expert dans votre domaine, suivez cette recette :

  • Faites-vous mal, ne ménagez pas vos efforts, qu’ils soient physiques ou intellectuels.
  • Soyez patient, il faut cumuler un nombre considérable d’heures de pratique pour devenir un véritable expert.
  • Entraînez-vous de manière réfléchie. Ne vous contentez pas de modes d’entraînement passifs. Recherchez activement à améliorer sans cesse vos séances d’entraînement.

Voilà, y’a plus qu’à !

Rendez-vous dans dix ans 🙂

Author: Alexandre Philippe

Alexandre Philippe est le fondateur du blog C'éclair. Constamment en quête de nouvelles méthodes d'organisation, de motivation et d'apprentissage, il délivre ses éclairs d'efficacité chaque semaine sur ce blog.

6 thoughts on “Ce qu’il vous manque pour devenir un expert

  1. Gourret

    Comme vous je pratique le vélo en cyclotouriste.J’ai fini de jouer au football à 50ans.
    J’ai signé une licence cyclotouriste en 1998 et en 2002 , Bordeaux-Paris randonneurs (630km) en 31heures.En 2003 , Paris-Brest-Paris ( autonome ) en 85h , 1230km.En 2007 , Paris-Brest-Paris en 85h (60ans)et dans des condition déplorables , pluie et vent .En 2008 , Bordeaux-Paris en 32h.En 2011 Paris-Brest-Paris en 2011(87h),et cette année L’Ardéchoise , la Volcanique , 180km , 7 cols , 3210 m de dénivelé et a ce jour 6000km depuis le 1er janvier 2013.
    Comme vous voyez pour un amateur ce n’est pas trop mal , je n’envie pas les pros surtout quand on entends ce qui se passe a propos du dopage.
    Si vous voulez le récit de mes P-B-P 2007 et 2011 , je vous les envoie.
    Kenavo , d’ar vech al .

  2. Alexandre Post author

    Bonjour Gourret,

    Merci pour le commentaire. Et bravo pour les performances, bien qu’il faudrait aussi ajouter en combien de jours les distances sont réalisées.

    Désolé pour la confusion, mais le but de l’article n’était pas de faire une éloge du cyclisme professionnel, ni du cyclisme tout court d’ailleurs.

    Il s’agissait surtout de voir comment on arrive à un niveau aussi élevé que le cyclisme professionnel, dans le but d’élargir cela aux autres activités comme l’écriture, la programmation, le dessin ou toute autre activité.

    A très bientôt

  3. Daniel

    Je suis ravi d’être tombé sur ton site.Ca fait de longues années que je me sens l’âme d’un autodidacte,mais,pour différentes raisons,je stagne encore et toujours,tant et si bien que j’arrive à un âge auquel il est rare je pense d’encore envisager des études .Et pourtant,malgré mes 61 ans,je me suis fixé un objectif assez élevé.J’ai repris des formations sur la Finance,seul de chez moi,avec des livres soigneusement choisis et reconnus comme étant les meilleurs dans ce domaine.Je suis déterminé d’arriver à un niveau le plus élevé possible par n’importe quel moyen à ma disposition.On dit parfois qu’il suffit de lire 3 livres sur un sujet pour en connaitre plus que la grosse majorité de la population.Donc,pour être certain d’être dans le bon,j’en lirai sans doute une quinzaine.Au plaisir de te lire.

  4. Alexandre

    Bonjour Daniel !!

    C’est un beau projet. Effectivement, si tu lis déjà 3 livres sur le domaines, tu en sauras déjà beaucoup si ce sont des livres exigents dans ce domaine.

    Il va te falloir aussi un “terrain de jeu” pour appliquer tout ce savoir. J’espère que tu sauras aussi dégoter les bonnes communautés de mordus pour t’épauler.

    Je te souhaites bonne pratique, et j’espère que tu vas progresser à bonne allure, mais surtout ne te décourage pas si les résultats tardent à venir au début 🙂

  5. Gourret

    Tout àfait d’accord avec toi .La réussite passe par la Persévérance et la Volonté.
    Par contre le MENTAL fait aussi la différence.
    Un petit “hiatus” dans tout cela c’est que souvent dans l’entreprise tout cela n’est pas pris en compte tout dépend de votre supérieur hiérarchique , par contre pour un travail indépendant pas de problème.

  6. Gilles

    La difficulté dans le cadre d’un travail indépendant, c’est le moment où l’on atteint ses propres limites. Cet article révèle le coté positif de l’exemple paternel Duclos-Lasalle (qui en d’autres cas peut être écrasant). Moi, après quinze ans d’activité indépendante, j’ai l’impression de stagner car je ne peux me développer. Je pense qu’il faut alterner l’effort personnel et les partages avec ses pairs.
    Mais notre société ne facilite pas l’épanouissement avec ses exigences de rentabilité à très court terme.
    En tout cas, que longtemps demeure la noblesse du sport, amateur ou professionnel, et un grand merci pour ce témoignage.

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