Nous sommes nombreux à céder à toutes sortes d’envies qui parsèment notre chemin. Tel le chant des sirènes, nous ne pouvons pas résister. Certains cèdent à l’attrait des vitrines des boutiques de vêtements, d’autres succombent à l’odeur des croissants chauds devant la boulangerie du coin, d’autres encore aux charmes d’un jeu vidéo captivant.
Nous avons déjà étudié quelques solutions pour tenter de résister aux tentations importunes qui parsèment notre quotidien dans l’article : 7 pistes pour mieux résister aux tentations.
Pourtant il existe des envies soudaines qu’il est très difficile, ni même souhaitables de réprimer, du moins à priori. Je veux parler de ces moments de profonde inspiration, où nous nous prenons tout à coup de passion pour un nouveau domaine de connaissance inexploré, ou bien lorsque se faufile en nous le profil d’une idée géniale ! Nous sommes alors inévitablement poussés à interrompre le flux de notre occupation du moment pour nous y consacrer.
Rappelez-vous Archimède, prononçant sa fameuse exclamation : "Eurêka !" dans son bain. D’après vous, aurait-il pu balayer l’enthousiasme de sa découverte d’un simple : "Ah non au fait je suis dans mon bain, je dois finir de me laver avant de passer à autre chose !". Au contraire, il a probablement bondi précipitamment hors de de son bain, négligeant le reste de sa toilette, pour écrire et vérifier fiévreusement la fameuse loi qu’il venait de découvrir : la poussée d’Archimède, tant que son cerveau en effervescence continuait d’alimenter le flot de ses idées.
Oui, il est vrai, donner libre cours à notre imagination et à notre créativité est essentiel pour innover et saisir les opportunités que la vie nous réserve. Cependant, il est difficile de se consacrer en profondeur à un projet particulier
lorsque l’on se passionne sans cesse pour la moindre trouvaille annexe qui chatouille nos neurones. Et c’est d’autant plus vrai avec la multiplication des médias.
Les amateurs de l’encyclopédie libre Wikipedia connaissent bien le phénomène. Le simple fait de se rendre sur un article Wikipedia peut se révéler fatal : le visiteur animé par une curiosité insatiable se retrouve bientôt piégé, arpentant le site pendant des heures et des heures en surfant de lien en lien sur la vague de la connaissance. Celui qui vient initialement pour en savoir plus sur un sujet, tel que le nombre d’habitants de la Lybie se retrouve de fil en aiguille à se passionner pour des sujet aussi divers que la grande rivière artificielle de Lybie, les eaux fossiles du Sahara, la Mauritanie, et toutes les contrées avoisinantes.
Vous me direz : voilà un beau voyage imaginaire ! Le problème, c’est qu’entre temps, on n’a pas avancé dans nos tâches. Bon allez c’est vrai, ça reste un excellent moyen pour relaxer nos pauvres neurones fatigués. Et avec un peu de chance, ce moment de flânerie pourrait bien s’avérer utile grâce à la sérendipité.
Après cet agréable moment de détente, nous refermons les onglets de notre navigateur favori pour reprendre une activité normale et nous consacrer à nos projets habituels. Ca, c’est le scénario bénin : on ouvre la parenthèse, on la referme. On a pris un peu de retard, mais les batteries sont rechargées et l’on reprends gaiement le travail le sourire aux lèvres.
La situation se complique nettement dans le cas précis où l’on débusque une passion pour laquelle nous sommes tentés de nous engager sérieusement. C’est le cas précis où nous ne voulons pas faire le deuil de ce beau moment d’exploration. Nous restons sur notre faim, nous voulons l’intégrer dans notre vie sous forme d’un nouveau projet.
Avant de se lancer à corps perdu sur ce nouveau projet qui nous passionne,
il sera pourtant essentiel de se poser avec lucidité la question suivante :
Que suis-je prêt à abandonner pour me consacrer à ce nouveau projet ?
Car nous le savons tous, le temps est une ressource limitée, une des plus précieuses que nous possédons, bien plus précieuse que l’argent !
Comme un gastronome devant le menu d’un restaurant réputé, nous devons prendre garde à faire les bons choix pour remplir notre assiette avec les mets les plus délicieux et les plus sains pour l’équilibre de notre vie.
Ajouter un met de plus dans notre assiette sans tenir compte de ce qu’il s’y trouve déjà est une habitude répandue mais qui peut nous jouer des tours. Nous sommes nombreux à avoir les yeux plus grands que le ventre et à risquer soit l’indigestion, soit de ne pas finir notre assiette.
Il faut donc choisir, en évaluant le potentiel de ce nouveau projet par rapport à l’utilisation actuelle de notre temps : est-ce que ce projet est bien aligné avec les buts que je me suis fixé ? Est-il plus pertinent que mes autres projets du moment ?
Notre sagesse nous conduira alors à adopter l’une des deux stratégies suivantes :
- Tuer cette envie dans l’oeuf : c’est le cas où nous avons la force d’esprit d’admettre que, certes, voilà un met intéressant. Mais comme nous avons clairement trop de choses dans notre assiette. Comme nous n’y trouvons rien qui soit moins goûteux et nourissant que l’on pourrait sacrifier en sa faveur. Nous décidons consciemment que ce n’est pas pour nous.
- Lui entrouvrir la porte en tant que projet émergent : si le projet semble tout à fait aligné sur nos objectifs et qu’il est plus porteur que certains projets actuel en perte de vitesse, il est peut-être utile de se le garder sous le coude. On pourra donc l’ajouter dans la liste de nos projets en cours, non pas dans la liste de nos projets stratégiques, mais en tant que projet émergent pour lui donner une chance de croître. Au bout d’une période de probation, si l’on se rends compte que ce n’est pas une lubie, que nous avons régulièrement du temps à y consacrer, et que nous sommes toujours aussi motivé, il sera temps de l’intégrer à part entière dans nos projets principaux. Parallèlement, d’autres projets de cette liste principale seront probablement devenus secondaires, et pourront donc être avantageusement remplacés par ce nouveau projet.
Pour réussir à prendre une décision rationnelle, on prendra bien soin de ne pas s’engager à la hâte. Je sais bien que c’est l’arme préférée des marketeurs. Mais n’investissez pas dans un nouveau projet à chaud. Prenez d’abord la peine d’observer une période de probation pour voir ensuite s’il vous intéresse toujours autant. Car il faut bien garder a l’esprit que passé la phase d’excitation initiale, tout projet possède un palier beaucoup moins enthousiasmant où l’on peine à avancer, une sorte de traversée du désert avant d’être de nouveau très motivé durant la phase de finalisation.
Personnellement, il m’est souvent arrivé de réserver tel ou tel nom de domaine idéal pour un nouveau site, pour me rendre compte quelques temps plus tard que je ferais mieux de me concentrer sur les sites que je possèdes déjà avant de passer à autre chose. Car il est vrai que la valeur ajoutée est comme les tartines de nutella : plus on l’étale, et moins il y a de goût ! Acheter un nom de domaine n’est pas un gros investissement, mais cela témoigne de la difficulté de résister au chant des sirènes.
Vous arrive-t-il de lancer des projets tout azimut pour ensuite vous rendre compte que ce n’étaient que des feux de paille ? Quelle est votre démarche pour gérer vos envies soudaines ? Je vous propose d’en discuter dans les commentaires de cet article.
Crédit photo : Javier Lastras
Ah, wikipédia ! Là tu touches vraiment à mon point faible. Et pour te dire un secret, généralement je m’y plonge avec délices car je sais que je peux y trouver de nouvelles idées d’histoires ou d’articles. En clair, je me retiens rarement mais j’ai la chance d’avoir des dates butoir très extensibles pour mes divers projets !
PS : Ma série « Les 9 étoiles du désert », est un peu née comme ça. 😉
Bonjour,
merci pour cet article !
Eh bien moi comme je connais mon enthousiasme et ma curiosité, je mets mes envies à l’épreuve du temps…
et si c’est vraiment une passion, l’énergie s’accumulera jusqu’à ce qu’elle m’oblige à prendre en main le projet.
Pour les choses dont je devrais me débarrasser il se passe exactement la même chose : j’accumule, j’accumule la « patience », les excuses et un jour, cela devient d’une évidence telle que je n’ai AUCUN regret.
Ainsi je gère « organiquement » mes désirs et mes rejets.
Elisabeth
La curiosité, les envies, les désirs… c’est la vie 🙂 et donc tant mieux si l’on en a beaucoup et que l’on doit « trier » après…
Mais je te rejoins tout-à-fait Alexandre quand tu dis ne pas vouloir courir trop de lièvres à la fois mais rester ouvert à tes idées en même temps
j’ai bien aimé cet article 🙂
isabelle
@Jean-Philippe : Tu devineras que l’exemple que j’ai cité était un de mes errement personnels sur Wikipedia.
Et en l’écrivant dans cet article, j’ai d’ailleurs pensé à tes 9 étoiles 🙂
Tu ne seras pas étonné alors que le Wikipedia Effect est même référencé dans le dictionnaire urbain 🙂
@Elisabeth : hehe, je vois que tu es une adepte de la 2ième stratégie. Je t’avouerai que j’ai souvent du mal à lâcher prise. C’est ainsi quand on est explorateur dans l’âme, ou alors peut-être est-ce le propre des émotifs ?